L’assemblée générale du syndicat de l’Emmental grand cru label rouge a eu lieu à Montigny-le-Roi le 25 juin. Les producteurs de lait constatent que malgré les grandes qualités de leur fromage, celui-ci n’est pas assez connu auprès des consommateurs.
Pour la première fois, la Haute-Marne a accueilli l’assemblée générale du syndicat de l’Emmental grand cru label rouge. Pour son président Sylvain Boby, ce choix haut-marnais est « l’occasion de montrer la diversité de nos terroirs et nos savoir-faire en filière emmental grand cru ». En effet, la Haute-Marne, qui compte 19 producteurs d’emmental grand cru label rouge, fait partie de la zone d’Indication Géographique Protégée « Emmental français Est-central », avec les quatre départements de Franche-Comté et les Vosges.
Production stable
La filière emmental grand cru label rouge représente 290 exploitations laitières, deux fromageries et quatre caves d’affinages. En 2023, la production a atteint 3713 t, en hausse de +0,5 % sur un an. En revanche, au cours de l’année, les volumes commercialisés diminuent par rapport aux douze mois précédents : -10,2 % à 2657 t, soit 303 t de moins.
Tous les segments sont impactés : coupe préemballée (1556 t, soit -6,2 %), portions (408 t, soit -17,5 %) et râpé (309 t, soit -27,8 %). Seul le segment des meules entières est en hausse avec 385 t (+1,6 %, +6 t). Oliver Vallat, animateur du syndicat, rappelle que « la vente à la coupe, qui représente les trois quart des ventes, est ce qui valorise le mieux le fromage ».
D’après Olivier Vallat, ce recul des ventes est causé par l’inflation car « le consommateur reste très sensible au prix ». Il est vrai que les prix de vente ont encore fortement progressé en 2023, comme partout en Europe, en raison notamment de l’évolution des prix du lait standard. Ainsi le prix moyen de vente sortie usine a progressé de +11,9 % pour le râpé et de +9,8 % pour les portions. Toutefois, on observe une nouvelle stabilisation (voire un début de repli) depuis début 2024.
L’emmental grand cru label rouge ne représente que 1,58 % des 234 507 t d’emmental français produit en 2023. Les volumes d’emmental français se rétractent à leur plus bas niveau depuis 10 ans et les importations proviennent essentiellement d’Allemagne, des Pays-Bas et d’Irlande. Ainsi, Sylvain Boby explique que la filière emmental grand cru label rouge « reste toujours très fragile sur plan économique » et que « la conjoncture de ces deux dernières années avec une inflation très importante amplifiée par une prise de marge des distributeurs accroit encore nos difficultés à exister sur le marché très concurrentiel de l’emmental ».
Manque de notoriété
Pour le président, il est donc « indispensable de faire connaître la valeur ajoutée de notre fromage comparativement aux emmentals standards. Sa qualité organoleptique bien sûr, avec son goût fruité et sa texture fondante, mais aussi les avantages environnementaux et sociétaux que permettent nos cahiers des charges et nos initiatives sur le terrain ».
L’éleveur du Doubs veut mettre le paquet sur la communication, même s’il reconnaît que « cela reste compliqué à mettre en œuvre lorsqu’une filière est en difficulté et dispose de peu de moyens pour investir dans ce domaine ». C’est pourquoi il lance un appel en invitant tous les producteurs de lait à s’impliquer dans la vie du syndicat : « Si nous ne défendons pas nous-même notre filière, personne ne le fera à notre place ! ».
Les producteurs d’emmental grand cru constatent que leur fromage est victime d’un manque de notoriété. « Pourtant la technicité de nos producteurs de lait, de nos fromagers et de nos affineurs est reconnue et démontrée. Preuve en est la qualité de nos fromages qui est toujours très appréciée des consommateurs lors des salons et foires et qui obtiennent de très bons résultats lors des tests organoleptiques prévus dans nos cahiers des charges » souligne Sylvain Boby.
Dans le cadre d’un programme national d’alimentation, la filière souhaite développer une action de communication pour relancer la connaissance du label rouge. « On a besoin de montrer au consommateur ce qu’il y a derrière, cette notion de qualité supérieure », indique Oliver Vallat qui souligne que le label rouge est le premier logo reconnu en France par les consommateurs, avant celui de l’AOP.
Travail vertueux
La filière souhaite également communiquer davantage sur le travail vertueux des éleveurs.
« Les producteurs de lait doivent faire preuve de résilience et s’adapter aux évolutions en cours et à venir. Nous le faisons fort bien, les exemples sont multiples dans nos exploitations avec des démarches pour améliorer notre autonomie fourragère ou encore réduire l’empreinte environnementale de nos activités. Je citerai par exemple la réalisation de bilans carbone pour diagnostiquer des pistes de progrès et l’implantation de panneaux photovoltaïques sur le toit de nos fermes et fromageries. Les praires et haies implantées par nos soins stockent du carbone et sont aussi des viviers de biodiversité » poursuit le président du syndicat.
« Nous espérons des collectivités territoriales une meilleure prise en compte de la réalité des filières comme la nôtre » a déclaré Sylvain Boby dans son rapport moral, en conclusion de l’assemblée générale. « En restauration collective nous souhaitons que notre fromage soit plus présent sur la table des convives dans le cadre de la loi Egalim. Pour cela nous souhaitons que soit rendu plus flexible le taux de circuits courts. Ce qui compte c’est d’offrir aux convives des produits locaux et de qualité certifiés, qu’ils soient fournis directement par un fabricant ou un grossiste intermédiaire ».