Nøs sur sa scène mobile équipée d’un panneau solaire.

L’artiste Nøs et sa musique électronique agricole en Haute-Marne


Guillaume Vannier, alias Nøs, utilise des sons de la ferme familiale pour faire de la musique électronique. L’artiste se déplace à vélo avec une remorque-scène qui inclut un système son et lumière alimenté par l’énergie solaire. Il est actuellement en tournée en Haute-Marne.

Guillaume Vannier a grandi dans le Morvan. Ses parents et son frère élèvent des vaches Limousines inscrites au Herd-Book et des poules pondeuses. Située près de Cluny, dans le sud de la Bourgogne, la ferme est passée en agriculture biologique depuis peu. Mais Guillaume Vannier a choisi la voie de la musique. Après avoir travaillé pendant six ans ses propres compositions au sein du projet FalKor, il s’est lancé dans une aventure solo sous le nom de Nøs.

Sonorités atypiques

Pour son premier album, l’ingénieur du son bourguignon va puiser son inspiration dans le monde agricole. Tout d’abord pour la création musicale avec des sons qu’il enregistre sur la ferme familiale : bruits de tracteur ou de cornadis, percussions sur un big bag… « Il y a tellement de sons interessants sur une ferme que je trouvais logique de faire mes propre samples. Une fois que j’ai ma palette sonore, je retravaille les sons pour qu’on ne les reconnaisse pas. C’est une recherche, une expérimentation et cela donne une patte particulière à la musique », explique Guillaume Vannier.

Le titre de l’album « Feraboli » est une référence directe au monde agricole. « C’est la marque de la presse à balles rondes que mes parents avaient, elle tombait tout le temps en rade au moment des foins alors cela m’a marqué », sourit le musicien. Les titres des morceaux sont liés à ses souvenirs comme « FF122 », qui est la référence de la fameuse presse italienne, « Meusoy », qui est le lieu-dit où se trouvait l’ancienne ferme familiale (et qui signifie « mauvaise terre » en patois) ou encore « la friche » et « les Milleries », qui sont les noms des parcelles de la ferme. « Enfant j’entendais tout le temps ces noms donc j’ai voulu me les réapproprier », indique l’artiste.

Mettre en avant le monde agricole

Pour aller jusqu’au bout du concept, la pochette de l’album et les illustrations réalisées pour sa promotion sont des macrophotographies (des photos très zoomées) d’éléments de la ferme : un ressort de semoir, des pneus de tracteur, des tôles empilées… Comme pour les sons enregistrés, les images sont retravaillées pour devenir difficilement reconnaissables. C’est au public d’essayer de trouver ce qui a été photographié initialement. « La pochette de l’album est en fait deux images de pneus superposées, ce qui fait penser à une méduse. Les visuels de cet album tirent sur le rose et le violet, ce qui colle bien avec l’esprit de ma musique qui est plutôt calme avec un tempo assez lent. Je fais de la musique électronique contemplative, donc accessible à tous. J’aime les choses assez planantes et emmener le public dans un univers » déclare l’artiste.

Avec cet album Nøs souhaite également sensibiliser le public aux difficultés du monde agricole, « notamment les petits éleveurs et producteurs qui sont souvent les grands oubliés du système. C’est une manière de mettre en avant des personnes qui sont habituellement dans l’ombre ». Le titre « Raiceunes » (« racines » en patois), en collaboration avec la chanteuse Margot Jamet, utilise des extraits de poèmes en patois morvandiau. « Cela parle d’une femme qui travaille au champ et qui rêve d’aller à la ville, de sortir de sa campagne pour voir d’autres choses mais elle est usée par le travail » explique Guillaume Vannier.

Cyclo-tournée en autonomie solaire

En 2021, Nøs décide de faire une première tournée, mais d’une façon particulière. « Si je fais un concert, je veux que ce soit à ma manière, quelque chose d’hyper autonome » souligne-t-il. Ainsi, l’artiste fait une tournée à vélo, avec une remorque sur mesure (construite par l’association Veloma) auto-tractée, incluant le système son et lumière, ainsi que des panneaux solaires pour être autonome en énergie lors des concerts. Le musicien est également équipé pour bivouaquer. « C’est une démarche écologique, montrer qu’on peut faire les choses différemment. Cela permet aussi de jouer à l’improviste où je veux », explique l’artiste qui précise qu’un tiers des concerts se fait « au gré des rencontres sur la tournée ».

« Il y a un côté challenge aussi car je ne me facilite pas la tâche en voulant être en autonomie solaire », avoue Guillaume Vannier, qui entame sa huitième tournée. « J’ai appris que le mot d’ordre est l’anticipation, je dois bien prévoir mes itinéraires car je ne peux pas emprunter une route dont le dénivelé dépasse 8 ou 9 %. En tournée je dois prendre mon temps car il me faut deux ou trois jours entre chaque concert pour laisser le temps aux batteries de se recharger. Si on me propose deux dates d’affilées, je me laisse suffisamment de temps en amont pour recharger complètement mes deux batteries ».

Pour Nøs, chaque tournée est « une aventure humaine », constituée de « belles rencontres » et de « formidables échanges » où l’artiste joue aussi bien devant une chapelle que sur une plage, au rythme de deux tournées par an, dont une en Bourgogne. Après plus d’un mois en Haute-Marne, il sera du côté de Lyon fin septembre. Et après ? « En 2025 je ne ferais peut-être pas de tournée, j’aimerais travailler sur un nouveau disque et je souhaite enrichir l’aspect visuel, en faisant des clips par exemple. J’ai aussi l’envie de monter un projet un peu plus important à plusieurs et pourquoi pas essayer de faire une plus grosse tournée en dehors de la France en 2026 » annonce Guillaume Vannier.

Après des représentations à Colmier le Bas, Saint-Loup sur Aujon, Langres et Chaumont, Nøs continue sa cyclo-tournée haut-marnaise. L’artiste sera en concert les 3 et 4 août pendant le festival du Chien à plumes (à la plage du lac de la Vingeanne), le 15 août à la Tour des Villains à Montsaugeon et le 18 août à Chatoillenot pour le Troquet au Lièvre.